Dans trois heures nous atterrirons sur le sol belge après un voyage riche en émotions à travers le Moyen Atlas et le Haut Atlas. La nostalgie me gagne déjà en me remémorant ces quelques jours au cœur du Maroc.
Notre objectif cette fois était de rencontrer les mineurs et artisans qui œuvrent pour nous permettre d’acquérir les merveilleux minéraux dont regorge le sol marocain. Nos vœux furent exhaussés bien au-delà de nos espérances. Nous revenons riches de rencontres et de partages.
LES ARAGONITES DE SEFROU
La première mission que nous étions fixés était de trouver les mines d’aragonite. Comme à notre habitude, nous partons avec des infos approximatives loin des circuits touristiques. Nous prenons donc la route à bord de notre voiture de location dans la direction de Tazouta dans la région de Séfrou. La route sillonne au travers de paysages magnifiques tantôt vallonnés, tantôt parés de falaises abruptes. Nous nous arrêtons un instant dans ce qui devait visiblement être une ancienne carrière de schiste, mais pas de carrière d’aragonite à l’horizon. Puis un petit village, nous nous arrêtons pour nous désaltérer et glaner quelques informations. Amid, qui par chance parle un petit peu français, nous indique que pour trouver les aragonites, il nous faut faire demi-tour, prendre à gauche dans environ 3 kilomètres puis prendre un chemin sur la gauche entre deux cailloux rouges à travers la forêts. Aujourd’hui, nous nous demandons toujours où étaient les deux cailloux rouges et nous supposons que ce que Amid a traduit par « forêt» étaient les quelques buissons qui bordaient le chemin qui nous a miraculeusement amené à une carrière d’aragonite en activité.

Des ouvriers sont à l’œuvre et nous expliquent que pour visiter, il faut l’accord du patron qui n’est pas là. Ils acceptent cependant que nous prenions quelques photos et très vite sans qu’on ne leur demande, ils nous emmènent voir comment ils travaillent et leurs récoltes du jour. L’uns d’eux nous montre différentes aragonites et nous expliquent par les gestes de quelle veine proviennent chacune d’elles, les plus beaux cristaux semblent provenir de la partie supérieure. Les lieux s’apparentent à un énorme gruyère tant il y a des galeries dans tous les sens sans aucun étançonnage, je m’aventure à l’entrée de l’une d’elle mais je n’insiste pas pour y rentrer davantage, les aragonites en surface suffisent à nous émerveiller. Nous proposons de leur en acheter mais ils refusent, je pense alors repartir bredouille mais l’un d’eux insiste pour que je reparte avec quelques spécimens qu’ils m’avaient autorisée à un peu dégager pour prendre des photos.
L’un d’eux nous montre des photos d’une fête autour d’un couscous, nous discutons davantage avec les mains qu’avec les mots puis reprenons la route avec un regard neuf sur les aragonites du Maroc. Elles seront à jamais associées à ces falaises rouges et aux hommes courageux qui dégagent avec grand soin, sous un soleil brulant et au moyen d’outils rudimentaires, ces fascinants cristaux à l’allure de petits hérissons.
EN ROUTE VERS MIDELT – CAPITALE DES POMMES ET CENTRE NÉVRALGIQUE DU NÉGOCE DES MINÉRAUX
La route est longue mais certes pas ennuyeuse, en peu de temps nous passons des plaines arides à la végétation éparse, aux forêts denses d’épineux, les habitations aux toits plats typiques des régions arides font place aux toits pentus des paysages montagnards. En passant par la forêt d’Ifrane, nous nous arrêtons pour approcher une famille de macaques qui vient nonchalamment à notre rencontre. Proches de la station de ski, ils sont vraisemblablement habitués à distraire les touristes.
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Nous arrivons à Midelt où nous attend notre ami Aboubakr. Nous partageons le repas digne des rois (un succulent couscous à la chèvre pour lequel je salive encore) que nous a préparé sa charmante épouse et nous faisons la connaissance de ses enfants.
Aboubakr nous emmène ensuite voir ses amis, ceux-là même qui nous confectionnent les sphères, cœurs, tours, bols, galets et autres objets en sélénite que nous proposons déjà depuis plusieurs années dans notre boutique L’Améthyste.be.
Chacun d’eux prend le temps de nous montré son travail, ce que nous recevons comme un privilège. Mais nous prenons surtout la mesure de la difficulté du travail accompli.

À LA RENCONTRE DES ARTISANS
Nous découvrons Saïd assis presque à même le sol dans une pièce où tout est recouvert de poudre de sélénite du sol au plafond, il façonne manuellement une à une des sphères en sélénite. Il nous montrera les différentes étapes de leur fabrication de la découpe des blocs aux différents polissages. Nous sommes impressionnés de voir comment, de ses mains, naît une sphère parfaite au départ d’un bloc de gypse. Nous prenons pleinement conscience de ses conditions de travail bien loin de nos normes européennes, ainsi que de la dextérité nécessaire pour exercer ce travail.
Dans une autre pièce Simo assis sur un vieux fauteuil de voiture s’attèle à la réalisation d’un petit bol qui deviendra la base d’une fleur de lotus en sélénite. Nous marchons sur un sol couvert de plusieurs centimètres de poudre de sélénite pour voir de plus prêt comment avec des gestes précis il défini les pétales de la fleur. Nous apprenons que les tours et les bols que nous proposons dans notre boutique sont tous réalisés par Simo.
Nous allons ensuite à la rencontre de Hicham et je peux à présent mettre un visage joyeux sur les jolis cœurs et galets de jaspe mookaïte que je vends dans ma boutique. Hicham s’attèle en ce moment à transformer des fragments d’os de dinosaures fossilisés en galets, je n’en avais jamais vu jusqu’alors et j’espère pouvoir bientôt vous en proposer.
Nous rentrons dans un autre petit local exigu où nous rencontrons Abelouahed dont le talent consiste à couper et polir des ammonites, je ne résiste pas à lui en commander.
Comme je l’ai écrit dans un post dans le groupe Facebook de l’Améthyste.be, ces moments partagés avec Saïd, Simo, Hicham et Abelouahed forcent le respect pour ces artisans de l’ombre qui durant des heures façonnent avec talent les pierres qui aboutissent dans nos maisons cosy.
Lorsque nous quittons les ateliers nous éprouvons beaucoup de gratitude pour ces hommes qui nous ont accordé de leur temps pour nous montrer leur travail.
MILLE ET UN CRISTAUX
Mais la journée est encore pleine de surprises. Retour chez Aboubakr où nous faisons la connaissance de son papa qui nous accueille avec beaucoup de bienveillance. Il nous ouvre la porte d’un grand local où sont empilées des centaines de boites remplies de merveilles. Mineur depuis son plus jeune âge, c’est un puits de connaissances dans le domaine des minéraux. Pour la petite anecdote, en préparant notre voyage je rêvais de trouver une wulfénite qui manque à ma collection et sans que je ne le demande, une des premières boites que Sadik nous fait découvrir contient, devinez quoi, de magnifiques wulfénites !

Sadik n’exerce plus la profession de mineur aujourd’hui mais il sait où et à qui s’adresser pour acquérir les plus beaux spécimens. Pas besoin de mots pour comprendre l’amour qu’il porte à tout ces cristaux qu’il nettoie lui même un à un avec le plus grand soin. À chaque fois qu’il nous ouvre une boite, nous sommes émerveillés par tant de beautés : des vanadinites à couper le souffle, des amas de cristaux d’azurite d’un bleu intense, de gros cristaux d’apatite, des amas de cristaux, des malachites qui semblent posées telles des plumes sur la roche mère, d’importants agrégats de cristaux d’épidote, etc...La liste semble sans fin, nous allons de découverte en découverte, mes yeux ne sont pas assez grands pour pouvoir tout voir et ceux de Sadik s’illuminent autant que les nôtres à chaque ouverture de boite.

Demain nous avons rendez-vous à la sortir de Mibladen avec Haytam, un mineur qui a accepté d’être notre guide et nous amener à vivre une expérience inoubliable sur le site minier où il travaille avec son père.
Pour la suite, voir LES MINÉRAUX DU MAROC – CARNET DE VOYAGE –Partie 2